Les produits chimiques utilisés en agriculture conventionnelle se classent
en 4 grandes catégories :
A-les insecticides : Se sont les plus dangereux même s’ils sont utilisés selon les normes. Celles-ci définissent un seuil de présence sur les productions au moment de la récolte. Mais la rareté des contrôles par les services des fraudes, liée, à la demande pressante des distributeurs (les centrales d’achat des grandes surfaces distribuent 80 % des fruits et légumes en France) d’avoir des produits uniformes, sans tâches ni défauts, se gardant le plus longtemps possible, et résistants aux manipulations du libre service, pousse les agriculteurs à protéger au maximum leurs récoltes, jusqu’à utiliser des insecticides la veille des récoltes en doublant ou triplant les doses. En principe inoffensifs pour la santé humaine d’après les tests effectués par les industries de produits chimiques et validés par les ministères de la santé et de l’agriculture, il s’avère curieusement que 10 ou 15 ans après leurs mises sur le marché ( le temps ou la molécule est protégée par brevet et donc très rentable pour l’industriel) ils n’étaient pas aussi anodins puisqu’ils sont retirés du marché. C’est le cas du D.D.T. (retrouvé dans les graisses d’enfants dont la maman en les allaitant leur ont transmis), du Lindane (que l’on retrouve dans les sols 25 ans après leur utilisation), et de toute une quantité qui sont supprimés à raison de plusieurs dizaines par an depuis 2 ou 3 ans. Supprimés d’utilisation en Occident mais dont les stocks sont envoyés dans le Tiers monde...
B-les désherbants : Le fléau n°1
des cultures est l’herbe sauvage. Les désherbants peuvent détruire
toutes les herbes qu’ils touchent ou selon les molécules, une
seule espèce. On les retrouve aussi dans les aliments, même après
cuisson. C’est le cas du pain où les analyses des contrôles
bio, portent sur 50 molécules différentes qui auraient pu être
apportées au moment de la fabrication du pain, au moment de la fabrication
de la farine, ou pendant la culture du blé et que l’on peut détecter
au moment de consommer. Les plantes O.G M. sont à grande majorité
résistantes à un désherbant : le Round Up. L’introduction
de sa molécule chimique dans les cellules des plantes, rendent celles-ci
résistantes. Ce désherbant tue tout ce qu’il touche en
bloquant la photosynhèse, sauf la plante O.G.M.. Il n’y a pas
d’augmentation de rendement si on compare avec une culture conventionnelle,
mais entraîne plusieurs effets secondaires : __ La dose de round up
dans chaque cellule de la plante en fin de culture est de l’ordre de
10000 fois supérieure au résidus d’un désherbage
au round up de façon classique (à quel point les sols vont arriver
à dégrader tant de produit chimique au fil des années
? et ne va-t-on pas le retrouver aussi dans la faune et la flore du sol ?)
__La Nature qui évolue vite a permis déjà l’apparition
de plantes sauvages résistantes
___Le gros problème qui se pose au producteurs est qu’ils ne
peuvent pas se défaire des repousses de l’espèce O.G.M.dans
les cultures suivantes.
C- les fongicides : La lutte contre les champignons aériens est d’autant plus difficile que les plantes sont sophistiquées et issues de croisements successifs ayant pour but d’augmenter les rendements. Les améliorations de rendements poussés à l’extrême rendent les plantes beaucoup plus fragiles. J’ai beaucoup moins de soucis en culture bio que je n’en avais en conventionnel car je respecte plus la nature des plantes : les salades mettent 10 à 20 jours de plus à pousser qu’avant mais leurs cellules ont le temps de fabriquer des parois plus épaisses, donc d’accès plus difficile aux mycéliums des champignons.
D- Les engrais : Après la guerre de 1945 un industriel, M. LIEBIG, a eut l’idée d’analyser les légumes pour avoir une idée de la valeur nutritive de ses plats. L’idée de rajouter dans le sol la partie prélevée par les récoltes et les plantes est en train de naître. Cela tombe bien puisqu’il s’agit en grande partie d ‘azote dont on a des stocks énormes au sortir de la guerre. L’azote est un explosif comme on a pu s’en rendre compte à Toulouse dans l’usine AZF et servait à cette époque pour fabriquer les munitions. D’ailleurs effectivement, les rendements, comparés à des cultures traditionnelles au fumier ou au compost, ont augmenté. L’avantage mis en avant à cette époque est qu’on a avec 100kg d’engrais un meilleur rendement qu’avec plusieurs tonnes de compost. A ce moment là, on se souciait que tout le monde ait suffisamment à manger pour oublier au plus vite les restrictions, mais on ne pensait pas changer en même temps la composition ni la qualité intrinsèque des légumes. L’évolution poussée à son paroxysme de cette réflexion, nous amène aux cultures hors sol actuelles, où la plante n’a plus de racines dans le sol, mais baigne dans une solution chimique adaptée, qui évolue en fonction de son âge. Cela supprime les maladies du sol apparues en culture conventionnelle, encore une fois, les rendements ont décuplé ( la tomate passe de 12 à 30 kg/m2) au détriment encore plus fort de ses résistances propres et de ses qualités nutritives. L’évolution qui se profile d’ici 10 à 15 ans est une culture dans un bâtiment industriel, coupé du sol, des aléas climatiques, en atmosphère contrôlée, et en eau aseptisée, où les rendements sembleraient s’approcher de 100 kg /m2. Les engrais azotés modifient la composition des sucs cellulaires
qui deviennent plus sucrés et donc plus appétents aux insectes
piqueurs (pucerons, acariens, psylles, aleurodes, trips, punaises..), ont
des parois moins épaisses ce qui facilite la vie de ces insectes.
Les fraudes sur les doses appliquées, sur le respect des délais d’application avant récolte, sur l’utilisation de produits non autorisés sur certaines cultures, par les producteurs, pour essayer d’avoir un produit irréprochable visuellement, a fermé la porte à des exportations vers des pays plus draconiens tels la Suisse ou l’Allemagne. Les lots refusés par ces pays se sont retrouvés sur le marché français avec l’aval des services sanitaires...
L’agriculture raisonnée
Depuis quatre ou cinq ans, la volonté au niveau du ministère
de l’agriculture de redorer l’image de l’agriculture a été
très forte. Phénomène qui s’est accentué
avec l’apparition de l’E.S.B.-vache folle-
Pour continuer à aider ses producteurs, sans se mettre à défaut vis à vis de l’Europe, laquelle a décidé de ne plus subventionner un secteur trop gourmand et de garder une enveloppe d’aides pour les pays de l’Est qui vont bientôt rentrer dans le marché commun, la France a décidé de mettre en place un cahier des charges spécifique, aboutissant à un label « agriculture raisonnée ».
Ce cahier des charges comprend plusieurs points que l’agriculteur doit
respecter. Schématiquement, il doit tenir à jour un cahier de
ses interventions dans les cultures, en indiquant, d’après ses
comptages d’insectes par exemple, qu’il doit faire une intervention
avec un produit chimique, à quelle dose il l’a utilisé,
où il a acheté ses produits etc. Le raisonnement qui l’amène
à traiter doit être noté et rendu en cas de contrôle.
Il n’y a pas de préconisations pour diminuer les doses, ni pour
supprimer un traitement. Au fond on lui demande de respecter la loi et de
pouvoir le prouver.
Concernant les engrais à mettre dans les cultures, on lui demande de
diminuer ses doses pour un meilleur respect de l’environnement, et des
nappes phréatiques. Une réduction de 15 à 30 % des apports
d’azote doit être respectée, ce qui pourrait être
très honorable. Mais la dose de base prise en compte pour calculer
la réduction a été tellement augmentée, que même
dans des pratiques très intensives aucun agriculteur ne doit changer
de méthode de travail pour rentrer dans la norme.
A aucun moment l’agriculteur n’est freiné dans l’utilisation d’engrais ni de produits chimiques. Les contrôles éventuels (qui ne sont toujours pas budgétisés), ne pourront établir un traitement trop près de la récolte ou à une dose trop forte car il pourra justifier d’un traitement réalisé dans les normes. La dégradation des produits chimiques se fait par la plante, tant qu’elle le peut, mais surtout par les conditions d’ensoleillement ou de pluie, donc de facteurs indépendants à l’agriculteur.
L’agriculture raisonnée n’a pas pour objet de garantir un produit de meilleure qualité sanitaire.
Ou en est la sécurité alimentaire dans ces conditions ?
Les consommateurs sont bernés dans une campagne de publicité
mensongère.
L’agriculture biologique :
Définition
: -- C’est une agriculture qui n’admet strictement aucun produit
chimique que le sol soit en culture ou pas.
--L’agriculteur s’engage à ses frais à divers contrôles
d’organismes indépendants.
Différentes méthodes : Depuis le début du siècle
dernier plusieurs personnes on établit différentes façons
pour cultiver de manière saine : Lemaire-Bouchet, Steiner, A de st
Denis, etc.
La base principale commune à toutes ces méthodes est la gestion
de la matière organique apportée au sol, afin d’y rétablir
ou d’y maintenir une vie riche et variée. Depuis quelques années
on voit fleurir des composts industriels agréés en bio mais
rien ne vaut un vrai fumier de ferme, composté. Le compostage est un
état du fumier, qui selon certaines conditions d’aération
et d’humidité, permet le développement de champignons
aérobiques élevant la température du tas jusqu’à
60 à 75 °c pendant plusieurs semaines. Les champignons dégradent
la matière organique qui est brute dans le fumier. Après cette
phase de température élevée, se succèdent pendant
les mois qui suivent une myriade d’insectes différents, chacun
témoins d’un stade d’évolution du fumier. Le compostage
dure entre trois mois et plus d’un an selon les matériaux qui
le composent et les cultures sur lesquelles il va être appliqué.
L’utilisation d’un milieu vivant et varié pour enrichir
le sol me permet de lutter contre certains champignons du sol défavorables
à certaines cultures (phytophtora des fraisiers). Une lutte chimique
détruirait partiellement le parasite. Le compost lui, apporte des vers
de terre, des enchytreïdés, des nématodes, des acariens,
des collemboles, des arthropodes, des bactéries, des algues, des actinomycètes,
des levures, etc., soit une vie beaucoup plus riche que celle qui était
présente antérieurement dans sol. Ce qui laisse peu de place
physique aux champignons indésirables.
Différentes
solutions : Contre les herbes sauvages ( elles concurrencent les cultures
dans le sol par prélèvements, et surtout par ombrage de la culture,
réduisant la photosynthèse) il n’y a pas de miracle :
c’est l’arrachage à la main la plus part du temps. Dans
certains cas j’utilise du paillage plastique au sol dont le retraitement
est très polluant. Il existe des machines à brûler : on
prépare le sol comme si on semait, on arrose, ce qui fait lever les
herbes, on les brûle, et on sème tout de suite sans retravailler
le sol. Mais cet outil est réservé à de grandes exploitations
du fait de son prix.
La différence du prix d’un légume bio ou conventionnel
réside à 80% dans le coût de la main d’œuvre
pour désherber.
Contre les insectes, je favorise le plus possible les prédateurs naturels,
soit en les achetant à des sociétés spécialisées,
soit en cultivant des fèves pour créer mon propre élevage
de pucerons sur lesquels vont venir des milliers de coccinelles, que je ramasse
et dispose dans d’autres cultures... . Je favorise la vigueur des plantes
et leurs équilibres pour qu’elles se défendent elles même
(moins de plantes au m2 par exemple).
Il existe des insecticides autorisés en bio qui sont des décoctions
de racines, que je me refuse à utiliser parce qu’ils tuent 100%
des prédateurs naturels avant de d’avoir éliminé
une partie seulement des parasites. Sur mon exploitation, d’une année
sur l’autre, on voit réapparaître les prédateurs
naturels en plus grand nombre et de moins en moins de parasites. C’est
un signe de la réalisation des équilibres retrouvés.
J’utilise des filets anti-insectes pour les salades. IL crée
une barrière mécanique aux invasions aériennes. Dans
certain cas (mouche de l’olive ou de la cerise) je pose des pièges
à glu dans les arbres.
Contre les maladies, le soufre et le cuivre sont autorisés en bio mais
je n’en ai besoin que pour les pêchers et la vigne.
Certaines défaites : Malgré cette recherche d’équilibre, il y a des cultures qui rencontrent des difficultés, souvent à cause de l’herbe que l’on n’a pas pu enlever à temps, quelquefois à cause d’insectes que l’on a pas pu gérer. Il faut se remettre en cause soi même pour pouvoir avancer et ne pas accuser le temps, les Dieux ou la fatalité ; la plupart du temps la solution est de notre ressort.
Les contrôles
: Effectués
par une entreprise indépendante que je paye, ils ont lieu plusieurs
fois par an. Le contrôle le plus approfondi, programmé sur rendez-vous,
se passe en deux temps : une partie au bureau ou l’on épluche
la comptabilité des achats, des ventes, les autorisations des produits
achetés, le cahier de cultures tenu journellement pour chaque parcelle.
Puis on va sur le terrain pour un premier contrôle visuel de la véracité
des cultures déclarées et de leur état. Par exemple,
l’herbe roussie par l’utilisation cachée de désherbant,
reste entière pendant plusieurs mois et donc décelable longtemps
après. Le contrôleur peut aussi prélever tout échantillon
de terre, d’eau, de plante ou de produit récolté pour
analyse en laboratoire. Plusieurs fois par an, selon le risque de fraude qu’il
évalue, il peut revenir sans prévenir, sur l’ensemble
de l’exploitation, analyser ce que bon lui semble. Je peux aussi être
contrôlé dans tous les magasins bio en France où j’ai
vendu avec la mention d’agriculture biologique par le contrôle
des fraudes ou par les organismes certificateurs.
Je reproche un peu au cahier des charges bio de ne pas s’être
attelé à différencier les cultures industrielles en bio
(souvent opportunistes) d’une agriculture de proximité, familiale,
diversifiée telle que je la pratique. C’est celle que beaucoup
de monde imagine quand on parle de culture bio.